Mehdi réalise des centaines de tests dans les nouveaux métros STIB: «Sable et béton pour simuler le poids des voyageurs»

Mehdi réalise des centaines de tests dans les nouveaux métros STIB: «Sable et béton pour simuler le poids des voyageurs»

Mehdi Chabane a obtenu son premier emploi chez CAF. Le constructeur espagnol conçoit les nouveaux métros M7 de la STIB. Après les tests à l’usine et au dépôt, l’électromécanicien liégeois éprouve le matériel roulant sur le réseau bruxellois.

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«Moi, je suis dedans tous les jours».

Quand on grimpe dans le nouveau métro M7 de la STIB, c’est un peu comme si on visitait le bureau de Mehdi Chabane. Le jeune électromécanicien liégeois est un des trois membres de l’équipe de test engagée par l’Espagnol CAF pour éprouver ses nouvelles rames bruxelloises.

Le premier train est arrivé en juillet 2020. Depuis, la STIB en a reçu 3 autres. Leur mécanique est éprouvée sur les voies d’essai des dépôts de Haren, de Delta et, depuis quelques semaines, sur le réseau réel. «Les tests durent plusieurs mois: c’est une question de sécurité», confirme An Van Hamme, porte-parole de la STIB. Mehdi Chabane reprend: «Les protocoles de test sont envoyés chaque jour d’Espagne. On teste tout ce qui peut l’être durant la nuit, pour ne pas surcharger le réseau ou empiéter sur la circulation des autres métros». Il s’agit de vérifier les gabarits des trains, leur compatibilité avec la signalisation, leur vitesse…

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Sacs de sable

Dernièrement, le jeune technicien s’est attaché à la régulation de température. «Le refroidissement via clim est assuré par les grilles du plafond et en bas, sous les banquettes, ce sont les radiateurs de chauffage. Ils fonctionnent par résistance». Autres tests menés en conditions réelles: ceux des suspensions, du freinage et de l’accélération. «On embarque des sacs de sable ou des blocs de béton pour simuler le poids des voyageurs», décrypte l’électromécanicien. «Le sol du train est protégé et les lests sont attachés. Trois paliers de poids différents sont analysés».

Ça se voit: Mehdi Chabane apprécie son job. Le premier pour lui. «J’ai été recruté spécifiquement pour l’arrivée du M7 de CAF en Belgique», révèle-t-il. «J’ai participé à la batterie de tests menés à l’usine espagnole: on apprend bien mieux auprès de ceux qui fabriquent». Depuis lors, le Liégeois a mené «des centaines» de vérifications. Il ne cache pas son espoir de se voir attribuer d’autres missions «une fois que les métros seront livrés».

Liège

C’est que la CAF, pour «Construcciones y Auxiliar de Ferrocarriles», a désormais une base à Bruxelles. «Notre bureau local se compose de l’équipe de testing, de personnel assurant garantie, fabrication et qualité, ainsi qu’un responsable ingénierie. Il travaille à l’interface entre notre matériel et la signalisation conçue par l’entreprise partenaire», énumère Ana Reparaz, project manager bruxelloise pour CAF.

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Dans le monde, CAF est active aux USA, en Turquie, en Algérie et forcément, en Espagne. Dans notre voisinage immédiat, le constructeur basque produit aussi trains et métros pour la France et les Pays-Bas. Plus près de Bruxelles encore, CAF a été sélectionnée en 2018 pour mettre sur rails le tram de Liège. Sa première rame est d’ailleurs en test depuis avril dans les environs de Saragosse, en Espagne. De quoi donner des perspectives professionnelles à Mehdi Chabane.

8.000 passages en plus par heure dans chaque sens

«Leuk, hé»

Elle ne boude pas son plaisir, Elke Van den Brandt, dans le fauteuil de conduite du nouveau métro M7 de la STIB. Depuis la station anderlechtoise Érasme, la Ministre bruxelloise de la Mobilité (Groen) a emmené la rame de 94m et 170 tonnes dans les tunnels vers les stations Eddy Merckx, Ceria et La Roue. De quoi donner au métro argenté ses premiers kilomètres officiels avec passagers.

À ses côtés, Bernard Guilmot veille au grain. Le responsable formation du métro bosse à la STIB depuis 35 ans, où il a commencé comme conducteur. «La conduite d’un métro se fait toujours à la main, sans intervention des pieds. Mais le manipulateur diffère selon les constructeurs et les modèles», nous dévoile-t-il. «Il peut être rotatif ou linéaire, comme ici dans le M7. Celui-ci est plus petit: il ressemble à un joystick».

La difficulté dans un véhicule sur rails, c’est toujours le freinage. La technologie de celui-ci répond vraiment bien

Le professionnel le confesse, il n’a pas encore tellement de bouteille au guidon de ce nouveau jouet. «Je dois juste avoir 8 ou 10h. Mais le tunnel est connu et l’environnement aussi. Bien sûr, il y a eu le simulateur à Haren, puis on a effectué des allers-retours dans le dépôt avant de sortir sur le réseau pour s’entraîner sans client». Verdict? «La conduite est agréable. La difficulté dans un véhicule sur rails, c’est toujours le freinage. La technologie de celui-ci répond vraiment bien», salue le chevronné pilote, qui a pu donner son ressenti au fabricant lors de tests.

À l’intérieur de la zone passagers, l’impression première est celle d’un plus vaste espace. Dans sa largeur de 2,70m, le M7 prévoit 742 places totales «strapontins repliés» (contre 716 pour les Boas M6 actuels). On note les emplacements PMR, poussettes et vélos très repérables sur les portes doubles. L’accès en sera facilité par des planchers bas à hauteur des quais. Autres détails: des afficheurs LED très lisibles entre les voitures mais aussi sur les côtés, au-dessus des fenêtres. Pour la sécurité, on apprécie les alertes lumineuses vertes lorsque montée et descente sont permises, puis rouges au moment de la fermeture. «Le design est signé de l’Anversois Axel Enthoven. Il est très soigné, magnifique. Et c’est un clin d’œil à Bruxelles», apprécie Brieuc de Meeûs, CEO de la STIB, en attirant l’attention sur les teintes et courbes du design voulant rappeler l’Art Nouveau.

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Les Bruxellois qui ont choisi la couleur argentée. Mais ce métro, ce n’est pas qu’une question de goût

Au total, la STIB a commandé 43 M7 à la CAF. Leur mise en fonction réelle est prévue cet été, sans date plus précise. Les 22 premières circuleront dès fin 2022. Elles seront livrées «à raison de deux rames toutes les 7 semaines environ». Elles rouleront sur les lignes 1 et 5, «ce qui permettra de libérer les anciens métros pour renforcer les lignes 2 et 6», promet la STIB. Objectif dès 2021: 1 métro toutes les 2’30’’ sur ces dernières, et 2’ sur les lignes 1 et 5.

«La Région bruxelloise investit 1 milliard dans la STIB en 2021», rappelle Elke Van den Brandt. «C’est de l’argent qui est bien utilisé. On est fier de notre nouvelle rame. Ce sont les Bruxellois qui en ont choisi la couleur argentée. Mais ce métro, ce n’est pas qu’une question de goût: grâce à lui, on augmentera la capacité du métro de 8.000 places par heure et par sens».