L'éclaircie judiciaire attendue depuis trente ans. Ce jeudi 16 décembre, une commission d'instruction de la cour de cassation a décidé de rouvrir le dossier du procès d'Omar Raddad, jardinier marocain condamné pour le meurtre de Ghislaine Marchal, le 23 juin 1991 à Mougins dans les Alpes-Maritimes. À 14 heures précises, au Palais de Justice de Paris, la cour rendait sa décision.
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Elle s'appuyait sur le dossier de révision de Me Sylvie Noachovitch, avocate d'Omar Raddad, qui l'avait déposé le 22 juin dernier, puis avait répondu aux questions des juges le 25 novembre dernier, accompagnée de son client. Ce dernier n'était toutefois pas présent ce jeudi. Auprès du Figaro, son avocate a dit son «immense joie et son immense espoir». «Une demande de révision, c'est toujours extrêmement délicat. Mais la Justice a eu le courage de regarder ce dossier, de reconnaître ses arguments très sérieux» s'est-elle félicitée. «J'ai prévenu immédiatement Omar, qui s'est trouvé extrêmement ému, et a tout de suite témoigné sa gratitude, notamment à la Justice française, à laquelle il croit toujours», a-t-elle également rappelé.
Omar Raddad avait été condamné en 1994 à dix-huit ans de réclusion, puis partiellement gracié par Jacques Chirac, et avait au total passé 7 ans et deux mois en prison. Dans une audience lapidaire, les magistrats ont déclaré ce jeudi «accepter les demandes de complément d'information» formulées par la défense, annonçant que la Justice procéderait à l'instruction de la révision.
Concrètement, l'institution va rebondir sur les analyses scientifiques présentées par Me Noachovitch, et qui mettent en évidence quatre ADN masculins sur des pièces à conviction, aucune ne correspondant à celui d'Omar Raddad. Sur les portes, portant les fameuses inscriptions «Omar m'a tuer» et «Omar m'a T», un ADN figure ainsi à 35 reprises, notamment mêlé au sang de la victime, ou encore entre les traces des doigts de Ghislaine Marchal… Comme si celle-ci avait été tenue par la main en rédigeant son accusation.
Une première demande de révision avait été faite en 2001, par le premier avocat Jacques Vergès, sans succès. Mais de nouvelles expertises avaient été notamment permises par une loi de 2014, portée par les députés Georges Fenech (présent ce jeudi pour témoigner de son soutien) et Alain Tourret. Celle-ci autorise un condamné aux assises à demander des investigations pour faciliter une demande de révision de procès, une procédure normalement rarissime.
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Soutien de la première heure, l'académicien Jean-Marie Rouart a salué une décision «formidable et courageuse». Quant à la famille de Ghislaine Marchal, elle déclare dans un communiqué transmis à l'AFP «prendre acte» de la décision ordonnant des investigations complémentaires. La famille de la victime «souhaite que ces investigations permettent de mettre un terme définitif à une affaire douloureusement vécue par elle» et «espère que ce nouveau volet judiciaire se déroulera dans un climat médiatique apaisé», selon le communiqué.
Après les vérifications demandées auprès d'experts et enquêteurs, la prochaine étape pourrait donc être de statuer définitivement sur la demande de réhabilitation d'Omar Raddad. La Justice aura plusieurs choix : rejeter le dossier à nouveau, réviser le procès, ou casser le jugement, rendant au jardinier Marocain l'innocence qu'il clame depuis toujours.