En quoi consiste la vente en viager ? Il s’agit pour l’acquéreur (le débirentier) d’acheter un bien immobilier sans avoir à verser l’intégralité du prix de vente le jour où il en fait l’acquisition. Du côté du vendeur (le crédirentier), l’opération revient à percevoir une rente mensuelle jusqu’à son décès en contrepartie de la vente de son logement.
Acheter en viager consiste donc à acquérir un bien en l’échange d’un capital de départ (le « bouquet »), puis du versement périodique d’une rente durant le restant de la vie du vendeur.
Une vente en viager peut se faire en viager libre ou en viager occupé.
Dans le cas du viager libre, la vente du bien immobilier s’effectue en pleine propriété. Dès la signature de la vente, l’acquéreur dispose du bien comme bon lui semble. Autrement dit, son droit de jouissance est immédiat. En cas de décès du vendeur, le débirentier arrête de verser la rente.
Il peut soit l’occuper (droit d’usage, ou usus) aussitôt la vente conclue, soit le louer (droit de mise en location, ou fructus), soit le revendre (droit d’aliénation, ou abusus) s’il y trouve son intérêt. En d’autres termes, la nue-propriété et l’usufruit se trouvent concentrés entre les mains du seul acheteur.
Toutefois, le viager libre ne peut pas prétendre à la décote (de 25 à 50%) dont bénéficie le viager occupé, qui correspond au coût du droit d’usage et d’habitation du logement par le vendeur. Pour un même bien, son prix est donc mécaniquement plus élevé qu’un viager occupé. La vente en viager libre permet bien souvent au vendeur de ne plus avoir à s’embarrasser de la gestion du bien immobilier.
Si le crédirentier (le vendeur) conserve un droit d’usage et d’habitation jusqu’à son décès, on parle de viager occupé puisque la vente se fait sur nue-propriété. Le débirentier (l’acheteur) qui acquiert le bien immobilier ne peut donc pas y habiter puisqu’il est occupé par le crédirentier.
Autrement dit : la nue-propriété revient à l’acquéreur, tandis que l’usus (droit d’usage) et parfois le fructus (la jouissance et l’utilité) demeurent pour le vendeur. Le débirentier n’aura la jouissance de son bien immobilier qu’au décès du vendeur ou à la renonciation de son droit d’usage (par exemple, dans le cas d’un départ en maison de retraite).
En contrepartie, l’acheteur bénéficie d’une décote pour occupation qui va en diminuant plus le vendeur est âgé. De facto, le viager occupé est la formule la plus abordable.
Le viager occupé est la formule la plus répandue, puisqu’il concerne la très grande majorité des contrats en viager.
Quelle est la répartition des charges et des taxes entre le vendeur et l’acquéreur dans le cas d’une vente en viager libre ? Ici, le nouveau propriétaire dispose librement du bien immobilier, pour l’occuper ou le mettre en location (il peut également le vendre).
On se trouve là dans une situation de vente ordinaire. Le débirentier (l’acheteur, celui qui verse la rente) doit supporter l’ensemble des charges locatives (telles que définies par le décret du 26 août 1987), des taxes et des impôts. C’est à lui que reviennent les dépenses d’entretien et les réparations du bien. Dans le cas où il loue le bien, l’acquéreur pourra faire supporter certaines charges et taxes à son locataire.
De son côté, le crédirentier (vendeur) n’a plus aucune charge à supporter. Il n’a donc plus à s’acquitter de la taxe foncière, de la taxe d’habitation, des frais de gros travaux, ni des charges locatives.
Lorsque la vente se fait en viager occupé, il est procédé à une répartition des charges et des taxes entre le vendeur (crédirentier) et l’acheteur (débirentier). Étant donné que le viager est une vente de gré à gré, cette répartition ne répond pas à des règles précises. Elle est conventionnelle selon les parties. La répartition des charges doit être mentionnée dans le contrat. À défaut, ce sont les articles 605 et 606 du Code civil qui s’appliquent.
Il est d’usage que le crédirentier conserve à sa charge :
De son côté, le débirentier est redevable :
Que ce soit dans une vente en viager libre ou une vente en viager occupé, le crédirentier (vendeur) demande généralement au débirentier (acheteur) de payer au comptant une somme fixe au moment de la transaction (« le bouquet »), puis de lui verser régulièrement (mensuellement, trimestriellement ou annuellement) une « rente viagère » jusqu’à la fin de sa vie.
L’apport du bouquet (qui représente généralement 20 à 30% de la valeur du bien immobilier) n’est pas obligatoire, mais il figure dans la plupart des viagers. Si un bouquet est versé lors de la signature du contrat, son montant est déduit du prix de vente pour calculer le montant de la rente viagère.
Concernant la rente viagère, l’article 1976 du Code Civil dispose qu’elle « peut être constituée aux taux qu’il plaît aux parties contractantes de fixer ». Son montant est calculé, sous l’égide du notaire, sur la base de l’espérance de vie du vendeur et selon les tables de mortalité pour les rentes viagères établies par l’Insee. D’autres critères entrent en jeu : l’âge du vendeur, la valeur du logement, le type de viager. Selon les cas, la rente est indexée ou non sur le coût de la vie. Elle s’éteint au jour au décès du crédirentier.
Le montant de la rente est aléatoire, puisque le nombre d’échéances n’est, par principe, pas connu à l’avance (il faut tenir compte de l’aléa de la durée de vie du vendeur). Si le bien immobilier est occupé par le vendeur (cela représente l’essentiel du marché des viagers), il faut tenir compte de la décote à opérer sur le prix du logement au moment de la signature du contrat.
Dans la plupart des ventes en viager, le vendeur (crédirentier) reste dans le logement. Il s’agit d’un viager occupé. Cela signifie que l’acheteur (débirentier) ne pourra occuper le bien immobilier qu’au décès du vendeur qu’ou à la renonciation par ce dernier de son droit d’usage.
En revanche, du fait justement de l’occupation du bien, l’acheteur bénéficie d’une décote sur le prix du bien. Cet abattement d’occupation est inversement proportionnel à l’âge du vendeur. Ainsi, la décote peut atteindre, par exemple, 30% si le vendeur a 90 ans et 50% s’il a 70 ans.
Contrairement à un viager occupé, le viager libre ne peut pas prétendre à la décote. Aucun abattement lié aux droits d’usage et d’habitation (DUH) n’est appliqué.
Qu’il soit libre ou occupé, le viager présente des particularités en matière d’impôts. Concernant tout d’abord la rente viagère perçue chaque année par le crédirentier (vendeur), elle est soumise dans tous les cas à l’impôt sur le revenu. Mais ce n’est pas la totalité de la rente qui est concernée. Une fraction de la rente viagère est exonérée.
La part imposable dépend de l’âge du vendeur au moment de la signature de l’acte notarié. Plus le crédirentier est âgé, moins sa rente est imposable. Le tableau ci-dessous établit le taux d’imposition de la rente viagère en fonction de l’âge du vendeur.
Fraction imposable de la rente viagère pour le rentier à la date du premier versement | |
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Âge du bénéficiaire de la rente | Parti imposable de la rente |
Moins de 50 ans | 70% |
De 50 à 59 ans | 50% |
De 60 à 69 ans | 40% |
À partir de 70 ans | 30% |
Exemple : pour une rente annuelle de 5.000 euros perçue par une personne âgée de 67 ans au moment où elle a commencé à percevoir cette rente, la part imposable s’élève à 2.000 euros (c’est-à-dire 5.000 x 40%).
Quant à l’acquéreur (débirentier, celui qui verse la rente), il ne bénéficie d’aucun avantage fiscal et ne peut effectuer aucun avantage au titre de l’impôt sur le revenu sur la rente versée, que ce soit en viager occupé ou en viager libre.
L’imposition sur les plus-values à la charge du vendeur s’applique dans les mêmes conditions qu’une transaction immobilière classique (application des conditions de droit commun). Mais comme la majorité des biens vendus en viager concerne la résidence principale du crédirentier, cela lui permet d’être exonéré d’impôt sur la plus-value (en vertu de l’article 150 U du Code général des impôts).
Qu’en est-il des dispositions fiscales entourant la vente de sa résidence secondaire en viager ? La plus-value est calculée à partir du prix fixé dans l’acte de vente. Ce prix comprend le montant d’un éventuel bouquet ainsi que la valeur en capital de la rente. Si le crédirentier est propriétaire de sa résidence secondaire depuis vingt-deux ans ou plus, il est exonéré de la part correspondant à l’impôt sur le revenu. Par ailleurs, il ne paie aucun impôt sur la plus-value s’il possède le bien depuis trente ans ou plus.
Dans la mesure où sa rente viagère correspond à une créance sur l’acheteur (débirentier) – et non à un actif immobilier -, le vendeur (crédirentier) n’a pas à faire rentrer le capital représentatif de la rente dans sa base imposable à l’impôt sur la fortune immobilière (IFI). En revanche, s’il s’est réservé l’usufruit ou le droit d’usage et d’habitation du bien (viager occupé), il est tenu de déclarer à l’IFI la valeur d’occupation du bien. Celle-ci est évaluée conformément au barème forfaitaire prévu par l’article 669 du Code général des impôts (CGI) selon l’âge de l’usufruitier.
Le tableau ci-dessous détaille le barème de l’évaluation fiscale de l’usufruit viager et de la nue-propriété, selon l’âge de l’usufruitier.
Viager : barème fiscal de l’évaluation de l’usufruit pour une déclaration à l’IFI | ||
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Source : article 669 du Code général des impôts (CGI) | ||
Âge de l’usufruitier | Valeur de l’usufruit | Valeur de la nue-propriété |
Moins de 21 ans | 90% | 10% |
De 21 à 30 ans | 80% | 20% |
De 31 à 40 ans | 70% | 30% |
De 41 à 50 ans | 60% | 40% |
De 51 à 60 ans | 50% | 50% |
De 61 à 70 ans | 40% | 60% |
De 71 à 80 ans | 30% | 70% |
De 81 à 90 ans | 20% | 80% |
À partir de 91 ans | 10% | 90% |
Dans le cas d’un viager occupé, et même s’il n’a pas encore la jouissance du bien, l’acquéreur doit déclarer la valeur de la nue-propriété de l’immeuble. Il peut déduire de la valeur déclarée le capital représentatif de la rente.
Qu’en est-il dans le scénario d’un viager libre (sans occupation du logement par le vendeur) ? Le débirentier doit déclarer à l’IFI l’intégralité de la valeur du bien immobilier. Il doit, en contrepartie, intégrer dans son passif déductible la valeur de capitalisation de la rente qu’il verse.
Dans le cadre d’un viager occupé, le vendeur (crédirentier) a la possibilité, quand il le souhaite, de libérer son bien immobilier. Cela correspond donc à transformer le viager occuper en viager libre. Cette opportunité se présente lorsque le vendeur décide de vivre chez un membre de sa famille, de s’installer en maison de retraite ou encore d’intégrer une résidence médicalisée de type Ehpad. Il abandonne alors son droit d’usage et d’habitation (DUH). Le vendeur est tenu de prévenir son acheteur (débirentier) avant son départ du logement.
ATTENTION : tout doit être finalisé au moment de la signature de l’acte authentique devant le notaire. Il faut prévoir, dans l’acte, une clause d’abandon de jouissance du bien à tout moment du propre chef du vendeur. Dans ce cas, cette clause de libération par anticipation doit indiquer le montant de la majoration de la rente à payer par l’acheteur qui retrouve alors la jouissance totale du bien (il peut l’habiter ou le louer). En général, cette majoration atteint 30% du montant de la rente viagère. Elle est fixée contractuellement dans le contrat viager.
Il faut que le crédirentier se mette d’accord avec le débirentier pour que celui-ci lui rachète son usufruit (sous forme de capital ou de rente). Il doit s’agir d’un accord entre les deux parties, et non d’une contrainte imposée au débirentier.
ATTENTION : la renonciation au droit d’usage et d’habitation doit être sans équivoque du fait du caractère irrévocable de l’abandon du DUH.
Le viager occupé présente un certain nombre d’avantages pour le vendeur. Cette solution lui permet :
Côté inconvénients pour le crédirentier, citons :
Du côté de l’acheteur, la vente en viager occupé peut s’avérer intéressante dans la mesure où :
En revanche, en optant pour le viager occupé, le débirentier :
Moins connu que le viager occupé, le viager libre est également destiné aux personnes qui désirent effectuer un investissement locatif ou acquérir une résidence principale. Et comme pour le viager occupé, la personne qui choisit la vente en viager libre doit avoir conscience des avantages et des inconvénients de cette option.
Côté avantage pour le crédirentier, citons :
En revanche, le viager libre présente quelques désagréments pour le vendeur :
Pour le débirentier aussi le viager libre a ses bons et ses moins bons côtés.
Voici une liste, non exhaustive, des avantages que présente cette option pour l’acheteur :
Du côté des inconvénients pour le débirentier, on peut évoquer :