[Entracte - Expo] Thierry Mugler, Couturissime, ou l’art de séduire avec les matériaux industriels

[Entracte - Expo] Thierry Mugler, Couturissime, ou l’art de séduire avec les matériaux industriels

Le dernier numéro

Quand les plumes et les perles côtoient le caoutchouc… L’exposition Thierry Mugler, Couturissime s’installe aux Musée des arts décoratifs de Paris. Pas besoin d’être un amateur de mode pour tomber sous le charme de ce défilé où les créatures fantastiques déambulent avec les robots. « J’aime les extrêmes », résume le créateur français.

Si vous parvenez à vous frayer un chemin dans la foule, vous débuterez l’exposition par sa pièce maîtresse : la fameuse robe chimère, présentée comme l’une des tenues les plus chères de la haute couture. Ici, on explore des territoires éloignés de l’industrie et de la « fast fashion ». Plusieurs milliers d’heures auraient été nécessaires pour composer à la main ce fourreau qui dévoile un kaléidoscope d’ailes de papillon, d’écailles et de diamants...

Thierry Mugler s'est inspiré du film Metropolis pour dessiner les armures de ses « créatures-robots ». Crédit : Christophe Dellière

Ce « bestiaire fantastique » fait partie des grands thèmes de l’exposition. Mais les lecteurs de L’Usine Nouvelle goûteront peut-être davantage les influences futuristes de Thierry Mugler, qui a régulièrement travaillé avec des designers industriels. On découvre ainsi le travail d’un chaudronnier aéronautique, Jean-Pierre Delcros, à travers des bustiers en chrome et des casques en métal.

[Entracte - Expo] Thierry Mugler, Couturissime, ou l’art de séduire avec les matériaux industriels

« Rendre les gens plus forts »

Thierry Mugler révèle aussi une obsession pour le monde automobile. En 1989, le styliste présente une collection rutilante inspirée des voitures américaines des années 1950 et plus précisément de Harley J. Earl, le designer qui a imaginé les ailerons des Cadillac Eldorado. Les pièces ne manquent pas d’humour : une ceinture est parée d’improbables pots d’échappement tandis qu’un bustier abriterait un allume-cigare fonctionnel.

Plus tard, l’artiste réalisera un tailleur en caoutchouc imitant les bandes de roulement de pneumatiques. Tout cela est-il vraiment de bon goût ? Thierry Mugler se défend d’habiller une femme-objet, se revendiquant au contraire des mouvements d’émancipation. « J’ai toujours essayé, dans mon travail, de rendre les gens plus forts en apparence qu’ils ne le sont vraiment », peut-on lire dans l’une des salles.

Notez l'allure du sac à main qui semble tout droit taillé dans un pneu. Crédit : Patrice Stable

Un arôme agroalimentaire dans le parfum

Derrière cet élan artistique, il y a aussi les défis techniques. Lorsque Thierry Mugler se lance dans la parfumerie, il travaille avec le designer industriel Jean-Jacques Urcun pour dessiner un flacon ressemblant à une étoile. Selon la légende, deux ans de recherche auraient été nécessaires dans les Verreries Brosse pour parvenir à couler le verre bleu dans des formes aussi complexes.

Des bornes olfactives permettent de sentir le parfum « Angel » et sa molécule d’éthyl-maltol. « Utilisé uniquement comme aromatisant dans l’industrie alimentaire, l’éthyl-maltol est employé pour la première fois en parfumerie dans Angel, ce qui donne naissance à une nouvelle catégorie de parfums dits “gourmands” », nous apprend le Musée des arts décoratifs. C’est l’un des nombreux détails truculents de cette exposition qui s’étale sur deux étages.

Exposition Thierry Mugler, Couturissime, du 30 septembre 2021 au 24 avril 2022 au Musée des Arts décoratifs de Paris.