[Reportage] Dans les souliers de deux cordonniers latinos au Canada

[Reportage] Dans les souliers de deux cordonniers latinos au Canada

Le chemin des cordonniers latino-américains au Canada est semé d'embûches. Cependant, pour Mme Arroyave et M. Aragón, les obstacles sont aussi des défis sur les plans personnel et professionnel. Des défis qui leur permettent continuellement d'avancer.

Voici leur histoire.

Mère, entrepreneure et immigrante

Pour Ana María Arroyave, la conception de chaussures et d'accessoires n'est pas quelque chose de nouveau. À l'âge de 14 ans, elle a créé sa première petite entreprise de fabrication de sacs en Colombie. Avec la vente de ses dessins, elle a payé ses études universitaires dans son pays natal.

Selon elle, le fait d'avoir commencé si jeune a transformé sa passion pour le design en une façon d'être et de vivre, et non en un simple moyen de gagner de l'argent.

Lorsqu'elle est arrivée au Canada, elle a hésité à rester. Elle ne pouvait pas imaginer sa vie sans pouvoir faire ce qu'elle aime le plus.

Cependant, c'est lorsqu'elle a acheté des chaussures ici et qu'elle ne trouvait pas de modèles qui lui convenaient qu'elle a recommencé à faire des chaussures pour elle-même.

Aujourd'hui, Ana María Arroyave possède sa propre boutique dans la ville de Sainte-Thérèse, au Québec, en plus de celle en ligne.

Elle partage son temps entre son fils de 6 ans, qui suit actuellement des cours en ligne, et la gestion de sa petite entreprise.

Ana Maria Dessin sous-traite une dizaine d'employés dans les villes de Hull et de Blainville. Ils connaissent tous bien ses produits et ses exigences de qualité.

Du luxe, des chaussures trophées et des célébrités

En 2015, un peu par hasard, le jeune designer Juan Sebastián Aragón a commencé une aventure qui l'a amené à rencontrer des célébrités et à proposer des produits de luxe uniques.

L'objectif de ce jeune homme d'origine colombienne vivant à Toronto est de créer des chaussures trophées qui représentent la lutte, la persistance et le sacrifice de chaque client.

Pour terminer ses études en commerce international à l'Université d'Ottawa, Juan Sebastian Aragon a dû partir en échange dans un autre pays. Il a décidé d'aller à Milan, en Italie.

C'est ainsi que j'ai dessiné un petit bonhomme, avec sa mallette, son t-shirt, son pantalon et une paire de petites chaussures. Le fait de voir ces petites chaussures m'a ouvert l'esprit, explique Juan Sebastián Aragón, qui a donc décidé de démarrer son entreprise en commençant par les pieds.

Et c'est ce qu'il fait depuis.

Entrepreneuriat immigrant

Au Canada, les immigrants ont généralement des taux plus élevés de propriété d'entreprise et d'emploi indépendant que les personnes nées au Canada.

Selon Statistique Canada, en 2016, 11,9 % des immigrants âgés de 25 à 69 ans possédaient une entreprise privée constituée en société ou étaient principalement des travailleurs autonomes, contre 10,1 % des personnes de la deuxième génération (nées au Canada avec un parent immigrant) et 8,4 % des personnes de la troisième génération et des générations suivantes (une catégorie composée de toutes les personnes nées au Canada avec deux parents nés au Canada).

L'agence publique explique également que des études antérieures ont montré que le taux plus élevé de travailleurs autonomes parmi les immigrants est dû, du moins en partie, à la difficulté de trouver un emploi rémunéré approprié.

Les entreprises des immigrants ont tendance à être plus petites que celles des Canadiens.

De leur côté, Ana María Arroyave et Juan Sebastián Aragón veulent développer leurs entreprises dans le pays. À terme, Mme Arroyave aimerait créer un atelier en Colombie, où les maroquiniers ont été durement touchés par la pandémie.

Une autre satisfaction de l'entrepreneure est que la plupart de ses chaussures sont respectueuses de l'environnement, car elle récupère les matériaux mis au rebut par les industries et les transforme en produits qui peuvent être utilisés au quotidien.

De son côté, Jaragon World poursuit son expansion en Italie. En fait, Juan Sebastián Aragón est convaincu que son entreprise aura un jour sa propre boutique sur la via Monte Napoleone.

Pour l'instant, l'entreprise continue à créer des pièces uniques afin de soutenir des causes chères au jeune designer et fabricant.

Note : ce reportage est également disponible en espagnol