Nadia Akacha, les islamistes veulent sa peau quoiqu'il en co�te

Nadia Akacha, les islamistes veulent sa peau quoiqu'il en co�te

Il ne se passe plus un jour sans que les islamistes n’évoquent, en mal, Nadia Akacha, cheffe du cabinet du président de la République. A l’exception de l’agression physique, ils n’hésitent devant aucune méthode pour cibler la quadragénaire : accusations fallacieuses, injures, complot…

Elle est celle par qui le mal arrive. Sur les pages Facebook des islamistes, elle est le Mal absolu, celle qui a isolé le président de la République, celle qui complote, celle qui a trahi la République, celle qui a des accointances avec l’étranger. Pour accabler Nadia Akacha, tout est bon à prendre. Il y a les cadeaux qu’elle offre elle-même à ses adversaires, comme celui de l’enveloppe empoisonnée, et il y a les histoires montées de toutes pièces comme ce document fuité publié par Middle East Eye.

Un document sans queue ni tête qui ferait rire n’importe quel observateur, mais qui trouve de l’écho auprès des islamistes, jusqu’au bureau exécutif d’Ennahdha qui a publié un communiqué à ce sujet.

Champions de la surenchère, les islamistes radicaux font mieux qu’un simple communiqué et ce en déposant officiellement une plainte contre la cheffe de cabinet l’accusant, ni plus ni moins, de complot contre l’Etat !

Le député islamiste radical et fugitif Rached Khiari l’accuse, pour sa part, d’intelligence avec la France. Lui, il s’est spécialisé dans le dénigrement de Mme Akacha en lui consacrant, tous les deux- trois jours, un long post Facebook pour la dénigrer et l’injurier. Il scrute le moindre détail pour exprimer sa haine, allant jusqu’à chercher sur Internet le prix de ses sacs à main.

L’intérêt n’est cependant pas dans les publications elles-mêmes, mais dans les commentaires des abonnés de ces pages. Ainsi, on ne compte plus les commentaires haineux et les appels à la pendaison en place publique de la cheffe de cabinet dans ces commentaires. Le dirigeant politique islamiste lance l’accusation, le plus souvent infondée et dénuée de preuves, et la meute de ses fans se précipite pour injurier à qui mieux-mieux.

Depuis quelques jours, les islamistes ne sont plus seuls dans la missive contre la cheffe du cabinet présidentiel. Les anciens proches et sympathisants du CPR se sont joints à la meute islamiste.

Ainsi, Adnen Mansar, ancien chef de cabinet de Moncef Marzouki, accuse nommément Mme Akacha d’avoir isolé le président de la République, d’avoir un rôle suspect et d’être responsable de plusieurs catastrophes au sein de l’institution présidentielle.

Cherchant à profiter de l’occasion et à se repositionner sur la scène politique, l’ancienne directrice de la communication de la présidence, Rachida Enneïfer, est sortie hier sur Mosaïque FM pour se joindre à la meute islamiste et attaquer la cheffe de cabinet. Dans ses propos, on sent le règlement de comptes à des kilomètres. Ce qui n’a rien d’étonnant de la part de celle qui a annihilé la cellule de communication de la présidence. Avec des mots à peine voilés, Rachida Enneïfer accuse indirectement Nadia Akacha d’être à l’origine de l’isolement du président et d’être l’instigatrice du projet de « coup d’Etat » dont parlent les islamistes.

« Calomniez, calomniez, il en restera toujours quelque chose ! », dit le proverbe. Les islamistes s’en donnent à cœur joie, surtout que leurs fans et sympathisants ne remettent pas du tout en doute leurs propos. Ils pensent sérieusement que leurs publications ont de l’effet et qu’ils vont réussir à déloger la cheffe de cabinet de son poste.

Du côté de Carthage, pour le moment, Nadia Akacha garde le silence et ne tombe pas dans le piège de répondre aux calomnies. L’idée de jeter l’éponge et de démissionner lui a effleuré l’esprit des dizaines de fois, nous confie un de ses proches, mais elle a réussi à trouver de l’énergie et à rester au-dessus de la mêlée. Au-dessus du dépotoir plutôt.

Ce qui lui donne toute cette assurance, c’est le président de la République lui-même. Ceci n’a rien de secret, puisque Kaïs Saïed fait en sorte de la faire apparaître dans chaque sortie publique ou presque. Il montre à tout le monde que Nadia Akacha a toute sa confiance.

Ce que les islamistes feignent de ne pas voir, ou ne voient pas tant ils sont aveuglés par leur haine, c’est que leurs attaques contre la cheffe de cabinet ont un effet inverse sur le président.

Quand ils disent que Nadia Akacha a isolé le président, c’est comme s’ils disaient que Kaïs Saïed est un gamin qu’une quadragénaire peut manipuler. Le chef de l’Etat considère tout simplement que ceci est méprisant envers lui.

Ce qu’ignorent les islamistes, c’est que Nadia Akacha consulte le président dans les moindres détails de son travail. Elle ne fait rien sans le tenir informé au préalable. Et c’est parce qu’elle le consulte sur tout qu’elle a toute sa confiance.

Ce qu’ignorent les adversaires de Nadia Akacha, qui prétendent souvent être bien informés sur ce qui se passe dans le palais (le dernier à avoir dit cela c’est Adnen Mansar, pas plus tard que ce matin), c’est que le président de la République est encore mieux informé qu’eux. Il sait qui fait quoi et qui est qui. Il sait qui rencontre qui et qui complote avec qui. Kaïs Saïed a une idée précise des noms des corrompus et des corrupteurs. Ceci n’a rien de secret, il l’a dit à plusieurs reprises.

Ils ont beau le croire isolé, Kaïs Saïd est informé de tout. Et ses informations, il ne les puise pas chez sa cheffe de cabinet. Quotidiennement, le président lit les rapports des services de renseignement du ministère de l’Intérieur et de l’Armée fort riches en informations relatives à ce qui se passe dans le pays et dans l’Etat profond. Il a des contacts réguliers avec plusieurs dirigeants politiques et députés en qui il a confiance. Il a également des contacts réguliers avec des artistes et des influenceurs. Enfin, on n’oublie pas les rapports privilégiés qu’il a avec son frère Naoufel et son ami Ridha Lénine qui, eux-mêmes, ont des rapports bien introduits dans la société.

Dès lors, dire et croire que Kaïs Saïed a été isolé par Nadia Akacha est juste risible. C’est méconnaitre le président de la République et son rayon d’action.

Pourquoi donc les islamistes et les adversaires de Nadia Akacha l’attaquent-elle, et pas lui ?

Il y a d’abord du machisme ordinaire, puisque les islamistes vivent encore dans le régime d’une société patriarcale. Prétendre, devant leurs fans, que Kaïs Saïed est dirigé par une femme, c’est le montrer comme un homme dénué de virilité. Cela a été dit et répété dans plusieurs pages islamistes.

Il y a ensuite une volonté de pousser à bout la dame (et la Femme est réputée être fragile, comme ils le croient) afin qu’elle démissionne. Kaïs Saïed perdrait ainsi une carte maitresse dans son cabinet si une dame de confiance le quitte. Ce départ fragiliserait énormément le président de la République.

Il y a enfin la recherche de crédibilité et d’efficacité. En attaquant directement Kaïs Saïed, les islamistes subissent immédiatement un retour de bâton. Les fans de Saïed sont très nombreux sur les réseaux sociaux et rappellent, sans cesse, que le président de la République est quelqu’un de propre. Pour eux, l’attaquer est une ligne rouge.

En revanche, quand c’est Nadia Akacha qui est attaquée, les répliques sont moindres voire inexistantes. Les centaines de milliers de fans de Kaïs Saïed ont un amour inconsidéré pour la seule personne du président et non pour son équipe. Du coup, quand les islamistes attaquent Nadia Akacha, ils sont assurés qu’ils ne vont pas être attaqués en retour et que leurs propos ne sont pas remis en doute.

Dernier point, et c’est le plus anecdotique, Nadia Akacha est attaquée par défaut puisque le président n’a quasiment pas de conseillers et qu’il n’existe ni de porte-parole ni de directeur de la communication pour répondre aux différentes accusations lancées à tort et à travers à l’assemblée et sur les réseaux sociaux. Faute d’autre bouc-émissaire, Nadia Akacha accuse tous les coups dirigés contre la présidence.

Cette ambiance basée sur les accusations fallacieuses et les injures ne saurait trop durer pourtant.

Un jour ou l’autre, il faut que le président de la République sorte pour dénoncer nommément toutes les parties qui l’attaquent d’une manière directe et indirecte. Il l’a promis à plusieurs reprises dans ses discours, mais il demeure toujours dans le silence. Jusqu’à quand ? Il est quand même anormal que sa cheffe de cabinet et femme de confiance soit ainsi attaquée quotidiennement sans qu’il ne la défende.

Tout aussi anormal qu’il n’ait pas de service de communication et de porte-parole capable de sortir dans les médias pour éteindre les incendies que ses adversaires allument quotidiennement ici et là.

Nadia Akacha est aujourd’hui victime d’une véritable cabale islamiste, certes, mais elle est aussi victime de son propre président.

Raouf Ben Hédi