Comment le « Peekaboo » de Fendi est devenu le it-bag des modeuses ?

Comment le « Peekaboo » de Fendi est devenu le it-bag des modeuses ?

Comment faire d'un it bag un intemporel ? Alors que le « Peekaboo » fête ses 10 ans au bras des femmes, Silvia Fendi, créatrice des accessoires de la maison, nous révèle ses secrets.

Cet anniversaire-là, toute la famille tenait à le célébrer. Il faut dire qu'il est aimé dans le clan. On parle ici de la famille Fendi et du « Peekaboo », sac notoire de cette maison, considéré comme un enfant roi. Aujourd'hui, il a 10 ans et, depuis 2008, son succès ne démérite pas. Qui avait des passions de sacs il y a une décennie se souvient très bien de l'émoi qu'a suscité l'arrivée de ce nouveau modèle. Très chic, couronné d'une allure de noblesse, aux ouvertures amovibles et intelligentes qui, selon l'humeur, révèlent d'autres aspects de sa physionomie : ce sac, tout le monde le voulait, et son prix élevé ne faisait même pas peur. Il entrait dans le cénacle rare des cadeaux exceptionnels : pour les 18 ans d'une jeune fille, pour la célébration d'un amour, pour un mariage, pour les 50 ans d'une femme. Très vite, bien sûr, on le vit au bras de nombreuses célébrités. Les premières fans furent Rania de Jordanie, Madonna, Sharon Stone, Sofia Coppola, Julia Roberts... Aujourd'hui, ce sont Amal Clooney, Meghan Markle, Naomi Watts, Lupita Nyong'o ou Rihanna... Ce qui étonne, c'est la diversité des personnes auxquelles il plaît : classiques, exubérantes, branchées, anonymes ou stars, il semble que toutes le veulent. Ensuite, c'est le plébiscite unanime : millennials, jeunes femmes ou jeunes grands-mères, on l'aime de 17 à 77 ans. Silvia Fendi, son heureuse créatrice, explique ce succès par la théorie surprenante de l'opposition. Il arrivait au bon moment après le triomphe incroyable du sac « Baguette », véritable cas d'école de la maroquinerie, connu dans le monde entier, créé en 1997 et vendu à plus d'un million d'exemplaires. Avec lui était apparu le terme de « it bag », qui lui avait été d'emblée affilié, se multipliant à l'infini dans d'innombrables versions, dont, à l'époque, Carrie Bradshaw dans « Sex and the City » en était la meilleure des démonstratrices. Elle explique : « On peut considérer le 'Baguette' presque comme un vêtement, souple, en tissu, brodé, pailleté, toujours décoré. Il représentait un moment. J'ai voulu le contrecarrer par un sac plus statutaire, épuré, dans une tradition de malletier. Il a connu un autre succès, car sans doute paraissait-il déjà familier. En fait, il était déjà vieux au moment de sa sortie, comme s'il avait toujours été là. » Ce que Silvia Fendi pourrait dire aussi, c'est la façon dont elle invente un geste, ce qui participe grandement au désir pour l'objet. Cela se révèle dans le nom choisi.

Ainsi, le « Baguette », parce que, tout petit avec sa bandoulière, il se coinçait sous le bras et laissait les mains libres - nouvelle posture. Avec le « Peekaboo », elle invente le principe du sac ouvert d'un côté, fermé de l'autre, créant une élégance un peu désinvolte. D'où son patronyme « Peekaboo », qui veut dire coucou, ce jeu où on se cache les yeux avec les mains et où on réapparaît en les ouvrant. Au-delà du modèle, il y a l'attitude. La créatrice dit simplement en riant : « Nous ne suivons pas les tendances, nous les créons. » Silvia Fendi et deux de ses filles, Delfina et Leonetta, se sont mises en scène pour raconter cette permanence des choses, jouant sur le dialogue transgénérationnel et la trans-mission. Elles se veulent toutes trois ambassadrices de ce sac qu'elles ont décliné selon leur personnalité. Leonetta, 21 ans, jeune fille cosmopolite, étudiante en sciences politiques à Londres, aime le « Peekaboo » tout mini et coloré. Delfina, jolie trentenaire, que nous connaissons déjà pour ses créations de bijoux, arbore le tout nouveau modèle, le « X-Lite », sans armature, tout mou, comme un grand cabas fourré à l'intérieur : « Il est léger, sans squelette, il est moderne. Il est pratique. Je l'aime beaucoup car il fait semblant d'être classique. » Enfin, Silvia, et son très classique noir de toujours.

Comment le « Peekaboo » de Fendi est devenu le it-bag des modeuses ?

Passé cette démonstration de luxe, il y a toute une saga italienne qui se déploie à travers ces trois femmes. Silvia raconte cette filiation particulière : « À travers l'histoire de Fendi, on peut lire l'évolution des femmes en Italie. Dans ce pays à la tradition très patriarcale, il y a eu ma grand-mère, qui a été une pionnière. Quand mon grand-père est mort, elle n'a pas fermé l'entreprise. Elle a travaillé tout en élevant ses cinq filles. Mieux, elle les a impliquées dans l'évolution de cette maison. Cette communion de femmes a réalisé quelque chose d'incroyable. Fendi aujourd'hui a un rayonnement international. » C'est une famille délibérément créative, viscéralement féminine. Et Fendi ne serait pas Fendi s'il n'y avait pas la conviction du clan. « Nous sommes vraiment le prototype d'une famille italienne, reprend Delfina. Nous passons beaucoup de temps ensemble. Nous trouvons toujours le moyen de nous réunir. Nous échangeons sur la création. La maison est toujours ouverte et notre mère nous appelle souvent pour savoir quand nous comptons passer la voir. » Leonetta rigole : « Elle nous téléphone aussi tout le temps parce qu'elle a des problèmes avec la technologie. » Silvia sourit : « Oui, c'est la différence entre les générations. Je leur dis : 'Venez déjeuner dimanche' parce que j'ai un problème avec mon ordinateur. Mais j'en résous aussi beaucoup pour vous ! Disons la vérité, mon portable sonne toutes les cinq minutes ! » Sans doute que leur conversation dure encore maintenant...

Dans quelques années, en 2025, la maison aura 100 ans. Leonetta : « Mon Dieu, 100 ans ! » Il semblerait que Fendi soit auréolée d'un certain caractère d'éternité. Ici tout dure, tout perdure, et cette pérennité a statué son ancrage dans la douceur d'un palazzo romain. Fendi domine le temps à tous les niveaux. Ici aussi, il est question d'être le maître des horloges. C'est l'histoire d'une famille où l'on se transmet la mode de génération en génération et, plus admirable dans un sens, de femme en femme, depuis le commencement, en 1925. Un artisanat exceptionnel, entre cuir et fourrure, qui ne cesse de perfectionner son savoir-faire. La fidélité unique d'un créateur, Karl Lagerfeld, qui dessine la mode femme depuis 1965. Chez Fendi, le temps n'est rien.

L'AMI « PEEKABOO »

Étonnant comme ce sac s'adapte aux personnalités les plus différentes : reines et princesses à l'image de Rania de Jordanie ou de Meghan Markle, icônes de la musique telle Rihanna, stars de cinéma comme Angelina Jolie, ou déesses des podiums comme Kaia Gerber... Il s'impose au bras de toutes les belles tel un fidèle compagnon de route, tantôt sage, tantôt drôle.